15 H 45 - 16 H 15 / Salle 1

Les nouveaux traitements des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI)

Docteur Christophe MICHIELS

Service d'Hépatogastroentérologie CHU DIJON

Les MICI (maladie de Crohn (MC) et rectocolite ulcéro-hémorragique (RCUH)) sont des maladies chroniques de plus en plus fréquentes (débutant tôt dans la vie) altérant la qualité de vie et pouvant mettre en jeu le pronostic vital (péritonite, occlusion, fistule, malnutrition, infection, cancer colorectal ou du grêle).


La prise en charge thérapeutique de ces maladies a longtemps été désespérante et se résumait à la salazopyrine, la corticothérapie et la chirurgie en cas de complications ou d'inefficacité du traitement médical. Une stratégie de traitement à plus long terme, visant à maintenir la rémission, a vu le jour dans les années 80-90 avec les immuno-suppresseurs tels que l'azathioprine, la 6 mercaptopurine puis le méthotrexate. Grâce aux progrès accomplis ces 20 dernières années dans la compréhension de ces maladies, de nouvelles molécules ont été développées depuis l'an 2000. Les 20 dernières années ont vu l'avènement de la ciclosporine dans la RCUH fulminante et les anti-TNF alpha (infliximab, adalimumab, golimmumab et maintenant les biosimilaires de l'infliximab) dans la maladie de Crohn et la RCUH.


Deux molécules issues de la recherche fondamentale des 10 dernières années ont enrichi récemment l'arsenal thérapeutique :

- Les anticorps anti intégrines dont le chef de file est le VEDOLIZUMAB (ENTYVIO®), qui est une biothérapie bloquant la migration et l'adhésion endothéliale vasculaire des cellules inflammatoires circulantes (Ac anti alpha4 béta7). L'atout de ce traitement est d'être un immunosuppresseur spécifique des tissus recrutant les lymphocytes alpha4bêta7 (filière oro pharyngée et tube digestif), réduisant de ce fait les infections opportunistes extra digestives. Il peut s'agir d'un point faible en cas de MICI avec manifestations extra digestives ou associées à d'autres maladies auto inflammatoires telles qu'une spondylarthrite ankylosante. Son usage est réservé en France à la RCH. Il s'administre en milieu hospitalier en perfusion de 300 mg toutes les quatre à huit semaines. D'autres molécules administrées par voie sous-cutanée sont en cours de développement tel que l' étrolizumab (anticorps anti bêta 7).

- L'USTEKINUMAB (STELARA®) est un anticorps bloquant la fraction p40 commune à deux interleukines pro inflammatoires IL12 et IL23 bloquant ainsi les deux voies inflammatoires activées que sont les TH 17 et les TH1 . Cette molécule a déjà fait la preuve de son efficacité dans le rhumatisme psoriasique et dans le psoriasis. Il n'a une AMM que pour la maladie de Crohn. Il s'administre par une perfusion initiale en milieu hospitalier à forte dose de l'ordre de 6 mg/kg et en traitement d'entretien par des injections sous-cutanées de 90 mg toutes les 8 à 12 semaines.

De nombreuses autres molécules viendront probablement à court terme enrichir l'arsenal thérapeutique tel que les inhibiteurs de Jak kinases (TOFACITINIB, FILCOTINIB, UPACITINIB) qui inhibent la transduction du signal intracellulaire des cellules inflammatoires, ou tels que les modulateurs de récepteurs de la SPHINGOSINE 1 PHOSPHATE (OZANIMOD) qui ont pour effet de bloquer les lymphocytes T auto-immuns dans les ganglions lymphatiques.


D'autres voies sont en cours d'exploration et commencent à donner des résultats prometteurs tels que la transplantation fécale et dans les cas extrêmement graves, l'autogreffe de moelle.


Ces traitements de fond immunosuppresseur ont réduit considérablement les complications digestives, infectieuses et tumorales des maladies inflammatoires du tube digestif mais en contrepartie, s'accompagnent d'une augmentation du risque thérapeutique tels que les infections opportunistes, les cancers chimio induits [notamment cutanés et hématologiques), les maladies de système tels que des lupus, des psoriasis, ou de manifestations immuno allergiques avec choc anaphylactique, eczéma, etc.... Pour réduire ces dernières, une surveillance attentive de tous les organes doit être instituée, notamment dermatologique, gynécologiques, dentaire. Il faut particulièrement être très attentif à la prophylaxie vaccinale. Ces complications doivent être connues du médecin généraliste impliqué dans la prise en charge et la surveillance ambulatoire de ces patients.