Diagnostic biologique de la pancréatite aiguë : amylase ou lipase ?

Dr Cyril HATEM
Hépato-Gastro-Entérologue

Le creusement du trou de la Sécurité Sociale est dû pour partie à la prescription inutile d'examens complémentaires voire supplémentaires. Ces examens sont parfois peu chers à titre individuel mais leur multiplication à grande échelle augmente sensiblement les dépenses de santé, sans impact positif en termes de qualité de prise en charge des patients. Dans ce registre, préciser et appliquer les modalités validées du diagnostic biologique de la pancréatite aiguë est un bon exemple pour éviter le gaspillage.
En cas de pancréatite aiguë, de nombreuses enzymes sont larguées dans le sang. La demi-vie de l'amylasémie est trop courte et surtout il y a beaucoup trop de cas d'élévations non spécifiques ou «fausses élévations» (macro-amylase, affections des glandes salivaires, perforation abdominale, occlusion, infarctus mésentérique, alcoolisme, acidose, GEU, salpingites, kystes ovariens, anesthésie générale...) pouvant faire errer le diagnostic. La prescription du dosage de l'amylasémie doit être complètement abandonnée, conformément à la dernière Conférence de Consensus sur la pancréatite aiguë (2001).
Le seul dosage utile en cas de suspicion de pancréatite aiguë est celui de la lipasémie qui coûte quasiment le même prix (2,43 €) que celui de l'amylasémie (2,16 €), tout en étant plus sensible (82-100%) et surtout beaucoup plus spécifique (82-99%).
Le dosage de la lipasémie ne doit être fait qu'en cas de suspicion clinique de pancréatite aiguë (douleurs abdominales de caractéristiques évocatrices). Aucune autre indication clinique de ce dosage n'est validée. La lipasémie doit être dosée une fois, le plus souvent aux urgences d'un hôpital. Le seuil d'élévation de la lipasémie à plus de trois fois la normale est retenu dans tous les consensus comme étant significatif pour évoquer le diagnostic de pancréatite aiguë. Toute élévation inférieure à ce seuil doit être considérée comme non signifiante. Des élévations de la lipasémie sont toutefois possibles en dehors du contexte de pancréatite aiguë, notamment en cas d'insuffisance rénale, de maladie cœliaque, de macrolipase (rare).
Malgré les conclusions claires de la Conférence de Consensus de 2001 sur la pancréatite aiguë et la publication d'un rapport d'évaluation de l'HAS de 2009 allant dans le même sens, la prescription d'amylasémie continue d'être pratiquée, avec un nombre de dosages annuels qui reste en France supérieur de 50% à celui de la lipasémie. De nouvelles actions d'information des médecins doivent être entreprises parallèlement au déremboursement du dosage de l'amylasémie.


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