Les conséquences sanitaires actuelles et prévisibles des changements climatiques en france
M. Jean-Pierre BESANCENOT
Directeur de recherche honoraire au CNRS, Climat & Santé,
Bien que le concept de changement climatique lié à une intensification de l'effet de serre remonte au moins au XIXème siècle, c'est seulement depuis une vingtaine d'années que le public et les scientifiques se sont vraiment intéressés au phénomène. Les répercussions auxquelles on peut s'attendre sur la santé sont d'une grande diversité. Elles recouvrent à la fois l'influence directe de la température sur l'organisme humain et des effets indirects, tels que l'impact du changement climatique sur la survie et la multiplication de tel ou tel microorganisme pathogène, ou de tel ou tel vecteur de ce microorganisme, rendant compte de la transmission de multiples maladies infectieuses ou parasitaires.
Dans un pays «tempéré» comme la France, compte tenu du niveau des infrastructures de santé publique, le risque de voir réapparaître un paludisme autochtone doit être considéré comme très faible, voire infime, contrairement à ce que l'on pu imaginer naguère. Il est permis d'être davantage préoccupé en ce qui concerne les maladies transmises par des moustiques du genre Aedes, telles que la dengue et le chikungunya, avec la progression du moustique tigre (A. albopictus). Il convient également de rester vigilant face aux phlébotomes, vecteurs notamment de la leishmaniose viscérale, et face à certaines tiques du genre Ixodes impliquées dans la borréliose de Lyme.
Il n'empêche, qu'à la différence de ce qui se passe sous les tropiques, les risques majeurs en France métropolitaine sont liés aux effets directs du réchauffement climatique. On ne dissimulera pas que certains des impacts sanitaires attendus ont des chances d'être bénéfiques ; ainsi, des hivers plus doux peuvent épargner bien des vies, alors même que la saison froide reste en moyenne la plus meurtrière. Mais la fréquence accrue, sinon l'intensité augmentée, des canicules estivales, venant s'ajouter au vieillissement de la population, fait redouter - si des mesures énergiques ne sont pas prises - une multiplication des drames comme celui de l'été 2003 (15 000 décès surnuméraires).
Dans la très grande majorité des cas, des effets sanitaires du changement climatique peuvent être envisagés pour un futur plus ou moins lointain, mais il paraît prématuré d'affirmer que ces effets sont déjà visibles. Il y a toutefois quelques exceptions. L'une d'entre elles peut être fournie par les maladies, comme l'infection à West Nile, pour lesquelles le réservoir de virus est aviaire : or, les migrations des oiseaux sont très sensibles à une évolution même minime des températures. Mais la principale exception vient des allergies au pollen, dont la fréquence et la sévérité croissantes semblent, au moins en partie, pouvoir être imputées au changement climatique déjà perceptible.
Il reste que la plus grande prudence s'impose. D'une part, les incertitudes demeurent nombreuses, tant en ce qui concerne l'évolution du climat que ses conséquences sanitaires prévisibles. D'autre part, ce serait une grossière erreur que de considérer les effets potentiels du réchauffement planétaire sans les replacer dans leur contexte, démographique, social et économique. La mondialisation, la circulation des biens et des personnes interfèrent en permanence avec le changement climatique pour en majorer les répercussions. Cela dit, on n'est pas impuissant face à ces «nouveaux risques» : il ne faut pas oublier, par exemple, que la mise en place d'un Système d'Alerte «Canicule et Santé» et d'un Plan National Canicule a déjà fait la preuve de son utilité lors de la vague de chaleur de juillet 2006, où ce double dispositif a permis d'épargner environ 4 400 vies.
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