Analyse des risques juridiques en médecine générale

Pr René AMALBERTI
Professeur Val de Grace

Le risque en médecine générale est moins connu que le risque des spécialités hospitalières. Les retards de diagnostic et les erreurs médicamenteuses sont les deux grands pourvoyeurs d'évènements indésirables,mais bien d'autres évènements existent (conduites thérapeutiques difficiles, visites impossibles ou décalées, chutes au cabinet, etc.).

Plus globalement, c'est la notion même d'erreur en médecine générale qui mérite une discussion sur le fond, avec une critique forte de toute vision trop inspirée de la situation hospitalière : la consultation ne dure que 15 minutes, les symptômes sont souvent récents, débutants, pas très graves, dans un contexte psycho-social ou de co-morbidité qui prend souvent le dessus dans l'entretien.

Un important travail a été réalisé à la Prévention Médicale sur les causes de ces évènements indésirables, grâce à une revue extensive de la littérature et une analyse de 1100 dossiers représentant 3 ans de plaintes au Sou Médical-Groupe MACSF.

L'intention est de mettre à la disposition des généralistes une source d'information actualisée, originale, et pratique sur la gestion des risques, en leur proposant des aides pédagogiques sous différents formats (guide de cours, cas cliniques commentés, films et dossiers), relayées par le site WEB de l'association. Deux notions clés et complémentaires de gestion des risques en médecine générale apparaissent particulièrement dans l'analyse réalisée :

La première porte sur la distinction entre compétences techniques (sémiologique et thérapeutique) et compétences non techniques (gestion de son propre stress et de sa fatigue, gestion des contrariétés, des conflits avec les personnes, du système médical, communications professionnelles, etc...).
La seconde porte sur l'identification de quatre tempos qui jouent habituellement comme forces de pression antagonistes sur la qualité des décisions en médecine générale :
a. le tempo du cabinet, de son agenda de journée (et des préoccupations privées),
b. le tempo du patient (demandeur multiple, parfois exigeant ou difficile, attendant un service),
c. le tempo du système médical (coordination avec les collègues, délais divers, qualité des correspondances), et enfin
d. le tempo de la maladie et du traitement (délais d'évolution propre de la pathologie et délais d'action thérapeutique supposés).
L'exposé, appuyé de nombreux cas cliniques, apprend aux généralises à identifier ces tempos, leurs effets indésirables, et les compétences qui leurs sont associées, et il propose des solutions simples pour les contrôler ; rappelons que la plupart des drames médicaux ne sont pas liés à l'incompétence des professionnels de santé, mais à la mauvaise organisation du système de santé. La formation académique est évidemment nécessaire, mais elle doit être complétée par une formation spécifique à travailler dans un monde complexe, plus ou moins coordonné, avec des pressions multiples, des patients agressifs ou indisciplinés, des demandes téléphoniques incessantes, et une conformité réglementaire consommant des temps importants.


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